Traitements
Un travail d'équipe
Quelque soit le traitement proposé, le patient est toujours au centre des discussions et c'est à lui et à lui seul de décider. Les différents médecins et paramédicaux qu'il rencontre au cours de son parcours thérapeutique sont là pour l'informer de manière claire, loyale et appropriée dans le but de lui présenter les possibilités thérapeutiques envisageables ou non, selon les recommandations nationales et données scientifiques disponibles en France au moment de la discussion.
Chaque proposition thérapeutique est préalablement discutée et validée en Réunion de Concertation Pluridisciplinaire dédiée. Le médecin traitant du patient est mis au courant grâce à l'émission de courriers médicaux.
Le choix des traitements dépend des caractéristiques du cancer de chaque patient : l'endroit où il est situé, son stade, c'est-à-dire son degré d'extension, son type histologique, c'est-à-dire la nature des cellules à l'origine de la tumeur, et son grade, c'est-à-dire son degré d'agressivité ou sa capacité à évoluer.
S'il le souhaite, après informations et un temps de réflexion, le patient peut refuser toute prise en charge. Il a connaissance des risques et des conséquences de son choix sur sa santé.
Il est également tout à fait possible de demander un second avis dans un autre centre médical, qui sera à la charge du patient.
Thérapeutiques au stade localisé
La chirurgie est le traitement de référence. Selon les caractéristiques anatomiques (taille et localisation de la tumeur), l'urologue peut réaliser deux types de chirurgie:
- la néphrectomie élargie, qui consiste à retirer entièrement le rein atteint par la tumeur et parfois les tissus environnants
- la néphrectomie partielle (ou tumorectomie), où seulement la tumeur est retirée, et le rein atteint est laissé en place
Les principes et risques de la chirurgie sont présentés par l'urologue lors d'une consultation dédiée. Une consultation anesthésique et un bilan sanguin sont nécessaires avant la chirurgie.
La chirurgie est le traitement le plus réalisé mais certains cas peuvent permettre d'autres thérapeutiques.
Lorsque la tumeur est de petite taille (généralement < 3 cm) et facilement accessible par le radiologue, on peut proposer des traitements dits conservateurs dont le but est détruire la tumeur rénale à l'intérieur même du rein. Deux types de traitements sont envisageables:
- la radiofréquence: destruction des cellules tumorales par une chaleur élevée présente au bout d'une aiguille insérée dans la tumeur.
- la cryoablation: destruction selon le même principe mais par le froid cette fois.
Dans certains cas, une surveillance peut être proposée pour suivre de près l'évolution de la maladie et la traiter uniquement si elle se développe ; ceci permet de différer la mise en place d'un traitement. Cette alternative qui doit être discutée lors de la réunion de concertation pluridisciplinaire reste réservée à des cas très particuliers : des patients âgés par exemple pour lesquels la chirurgie est problématique ou des patients qui présentent une tumeur de petite taille, en particulier si le cancer relève d'une forme héréditaire.
Thérapeutique au stade localement avancé
La chirurgie est le seul traitement envisageable et il s'agit le plus fréquemment d'une néphrectomie élargie.
S'il existe un envahissement endo-vasculaire (thrombus veineux dans la veine rénale, la veine cave inférieure ou la veine cave supérieure), la chirurgie est réalisée de manière conjointe par l'urologue et un chirurgien vasculaire.
Ces deux médecins ainsi que l'anesthésiste sont rencontrés dans des consultations dédiées avant la chirurgie.
Thérapeutiques au stade métastatique
Généralités
Au stade métastatique, le but des thérapeutiques est de ralentir l'évolution de la maladie, d'en faire une maladie chronique.
Avant tout traitement, le patient rencontre l'oncologue médical. Cette consultation est importante de part et d'autre:
- pour l'oncologue: il évalue l'état général du patient et recherche s'il existe des contre-indications ou des particularités qui pourraient interdire une thérapeutique ou nécessiter une adaptation (dans la posologie ou le rythme d'administration des traitements par exemple).
- pour le patient: il est informé des différentes possibilités thérapeutiques avec leurs objectifs et leurs effets secondaires possibles. Il peut poser ses questions et être accompagné (par un proche, par sa personne de confiance, par son curateur ou tuteur...)
A l'issue de la consultation, le patient se voit remettre une fiche d'information sur son traitement, un Plan Personnalisé de Soins et les ordonnances nécessaires au bon déroulement de son traitement.
Suite à ce temps médical, le patient rencontre une Infirmière Diplômée d'Etat (IDE) qui reprend avec lui les informations données par le médecin, revient sur certains points clefs, anticipe les rendez-vous, propose l'accès aux Soins de Support et répond bien entendu aux questions.
En oncologie, les thérapeutiques peuvent être distinguer par de nombreux critères (leur nature, leur mode de fonctionnement, leur administration). Une des distinctions majeures est leur action au sein du corps, on oppose:
- les traitements systémiques (chimiothérapies, hormonothérapie, thérapies ciblées, immunothérapie) qui vont agir dans tout le corps humain et vont donc traiter plusieurs lésions à la fois
- les traitements locaux (chirurgie, radiothérapie, radiofréquence, cryoablation) qui ne vont traiter qu'un seul site tumoral à la fois
Le parcours thérapeutique d'un patient peut être composé de plusieurs traitements, qu'ils soient systémiques ou locaux.
L'immunothérapie
L'immunothérapie est un des traitements clefs du cancer du rein métastatique.
Il n'existe pas une immunothérapie mais des immunothérapies qui différent suivant le mécanisme ciblé. Les dernières données scientifiques ont mises en évidence que les cellules cancéreuses avaient la capacité de ne pas être reconnue par notre système immunitaire, ce qui les protège d'une destruction naturelle par nos propres globules blancs.
Le but des immunothérapies est de lever cette immunité, de permettre à nos défenses immunitaires de reconnaitre et de détruire les cellules tumorales.
De manière générale, les immunothérapies n'ont pas les mêmes effets qu'on associe habituellement aux chimiothérapies. Leur mécanisme d'action étant totalement différent de ces dernières, leurs effets secondaires également. L'immunothérapie peut être responsable dans certains cas d'un "emballement" immunitaire pouvant toucher la peau, la thyroïde, le tube digestif, les poumons... c'est à dire les organes où les globules blancs sont naturellement très présents.
Il est possible de combiner deux immunothérapies ou d'associer une immunothérapie avec une thérapie ciblée (les inhibiteurs de tyrosine kinase en particulier) pour essayer d'obtenir une réponse optimale.
Actuellement en France, dans le cancer du rein, trois immunothérapies sont disponibles dès le diagnostic de cancer du rein métastatique:
- l'ipilimumab, ciblant le CTLA-4
- le nivolumab, ciblant le PD-1
- le pembrolizumab, ciblant le PD-1
L'ipilimumab est forcément associé au nivolumab tandis que le pembrolizumab doit être associé à un inhibiteur de tyrosine kinase (l'axitinib). Ces traitements sont réalisés par perfusion en quelques heures, il n'est pas nécessaire de dormir à l'hôpital pour recevoir ces thérapeutiques. Il n'y a pas non plus besoin de site veineux implantable (ou PAC) ou de PICC-Line sauf si les IDE ont des difficultés à perfuser le patient. Dans ce genre de cas, il est alors décidé d'avoir recours à un de ces dispositifs, non pas par sécurité, mais par confort pour le patient.
Le choix entre la double immunothérapie ou l'immunothérapie + inhibiteur tyrosine kinase dépend des caractéristiques cliniques et biologiques du patient et est discuté avec l'oncologue médical.
Les thérapies ciblées
Pour comprendre l'intérêt d'une thérapie ciblée, il faut se rappeler le principe d'action d'une chimiothérapie. Cette dernière agit sur toutes les cellules qui présente une prolifération, un dédoublement rapide. Elle n'est pas spécifique d'un type cellulaire ou d'un mécanisme d'action particulier.
A la différence, les thérapies ciblées sont, comme leur nom l'indique, ciblées sur un mécanisme tumoral particulier. Ce mécanisme est connu pour donner à la cellule cancéreuse un avantage (en survie, en prolifération, en résistance aux système immunitaire...).
En inhibant cette avantage, les cellules cancéreuses se voient amputer d'une caractéristique essentielle à leur survie et donc leur progression est ralentie voire complètement mise à zéro.
Ces mécanismes tumoraux peuvent varier d'un type de cancer à un autre (ils sont différents entre un cancer du poumon et un cancer du sein par exemple)
Dans le cancer du rein, deux mécanismes particuliers ont été mises en évidence pour donner un avantage aux cellules cancéreuses:
- la voie du VEGF ou voie de l'angiogénèse. Lorsque ce mécanisme est sur-sollicité, il permet à la tumeur de créer de multiples vaisseaux sanguins en son sein qui lui servent à la fois à obtenir les éléments essentiels à sa prolifération et également à disséminer, c'est à dire de créer de nouveaux sites métastatiques à distance.
- la voie PI3K / ATK / mTOR impliquée également dans l'angiogénèse et la prolifération (la croissance) cellulaire.
Le dérèglement de ces voies a été très fréquemment retrouvé dans le cancer du rein.
Un des moyens d'inhiber ces mécanismes est l'utilisation d'inhibiteurs de protéines spécifiques (identifiées comme essentielles au bon fonctionnement d'une de ces deux voies).
Ces inhibiteurs de protéines sont eux mêmes des protéines crées de manière artificielle qui vont aller cibler ces protéines "clefs" d'un de ces deux mécanismes et qui vont permettre de diminuer voire d'arrêter l'utilisation de ces voies de signalisation par les cellules cancéreuses.
On peut avoir accès en France dans le cancer du rein, à l'heure actuelle, à plusieurs thérapies ciblées:
- des inhibiteurs de tyrosine kinase (ciblant plus particulièrement l'angiogénèse): le sunitinib, le sorafenib, l'axitinib et le pazopanib
- des inhibiteurs de mTOR tels que l'éverolimus
La particularité de ces traitements sont qu'il s'agit de traitements oraux c'est à dire de comprimés qui sont pris au domicile par le patient.
Au CHU de Limoges, le suivi de la prise et des effets secondaires de ces thérapeutiques est regroupé au sein d'une unité spécifique: le Centre de Thérapies Orales où médecins, IDE et pharmaciens hospitaliers assurent les différentes missions énoncés ci dessus.
Les essais cliniques (ou essais thérapeutiques)
Selon le souhait du patient et l'évaluation clinico-biologique de l'oncologue médical, il peut être proposé la participation à des essais cliniques.
Le but est l'accès à des thérapeutiques innovantes, généralement ciblées, non encore disponibles de manière usuelles en France.
Il s'agit d'une proposition réalisée par l'oncologue, cela n'est pas obligatoire.
Ces essais peuvent être réalisés sur Limoges ou dans d'autres centres suivant la disponibilité de l'essai clinique.
- Si l'essai est disponible sur Limoges, le patient est amené à rencontrer un oncologue médical membre de l'Unité de Recherche Clinique en Oncologue (URCO), qui est différent de son oncologue médical habituel. Cela ne veut pas dire que ce dernier arrête de suivre le patient; au contraire, le suivi devient double.
Le médecin de l'URCO informe de manière détaillée, à la fois orale et écrite, le patient et répond à ses questions. Il vérifie également qu'il n'existe pas de contre indications à l'inclusion dans l'essai clinique.
Après signature du consentement éclairé par le patient, l'inclusion est réalisée et le traitement peut être effectué sur Limoges.
- Si l'essai n'est pas disponible sur Limoges, l'oncologue médical et le patient choisissent ensemble le centre le plus proche proposant le ou les essais cliniques voulu(s). Le patient se rend ensuite dans le centre spécifique et le reste de la prise en charge est identique à celle effectuée sur Limoges mais réalisée exclusivement dans ce centre.
Particularités: le stade olido-métastatique
Le stade oligo-métastatique concerne les patients avec peu de métastases (généralement < 3).
La spécificité de ce stade est que chaque site tumoral (tumeur initiale rénale + métastases) peut subir de manière séquentielle (à la suite les uns des autres) un traitement local.
- La tumeur rénale primitive peut être traité par chirurgie.
- Les différents sites métastatiques peuvent être pris en charge par différents traitements, tels que:
- la chirurgie
- la radiothérapie (stéréotaxique ou non)
- la cryoablation
- la radiofréquence
Ce type de séquence thérapeutique permet d'éviter ou de retarder la mise en place d'un traitement systémique comme l'immunothérapie ou les thérapies ciblées.